Paris, 3 juillet 2025 – La capitale française a abrité la 8ᵉ édition du Sommet Annuel Africain des Mines, un rendez-vous majeur pour les décideurs et investisseurs du secteur extractif africain. Parmi les voix qui ont marqué ce forum stratégique, celle de Mohamed Lamine Sy Savané, Ministre Directeur de Cabinet à la Primature de la République de Guinée, s’est distinguée par une vision ambitieuse, centrée sur la souveraineté, la transformation locale et le développement inclusif.
Dans cet entretien exclusif accordé à Guineemining.info, il revient sur les orientations majeures de la politique minière guinéenne et les enjeux d’une nouvelle gouvernance des ressources.
« La souveraineté minérale n’est pas un repli, mais une voie vers des partenariats plus équilibrés »
Guineemining.info : Dans un contexte de repositionnement stratégique de la Guinée sur la transformation locale de ses ressources, comment le gouvernement entend-il articuler souveraineté minérale et attractivité pour les investisseurs étrangers ?
Mohamed Lamine Sy Savané :
Je crois fermement que la souveraineté minérale ne doit pas être perçue comme un repli, mais comme une opportunité de bâtir des partenariats plus équilibrés et durables. Le gouvernement guinéen, sous l’impulsion de Son Excellence Monsieur le Président de la République, œuvre à repositionner notre pays comme une puissance minière responsable, capable de transformer localement ses ressources pour créer de la valeur ajoutée.
Cela se traduit par des réformes normatives ambitieuses, un cadre juridique plus stable, et des incitations ciblées destinées aux investisseurs qui partagent cette vision de transformation. Nous ne cherchons pas à exclure, mais à co-construire : attirer des partenaires engagés pour la souveraineté économique de la Guinée, tout en maintenant un climat des affaires compétitif, sûr et prévisible.
Un ancrage local renforcé des bénéfices miniers
Guineemining.info : La Guinée attire aujourd’hui de grands projets internationaux. Quels mécanismes sont mis en place pour que les communautés bénéficient plus directement de cette dynamique minière ?
Mohamed Lamine Sy Savané :
La légitimité de l’action publique dans le secteur minier repose sur sa capacité à produire des effets tangibles pour les populations locales. C’est dans cette optique que l’État guinéen a renforcé l’encadrement des retombées communautaires.
Nous avons mis en place des instruments tels que le Fonds de Développement Économique Local (FODEL) pour les collectivités abritant des opérations minières, et le Fonds National de Développement Local (FNDL) pour un développement plus équitable à l’échelle du pays.
Les collectivités sont également responsabilisées dans la gestion des redevances minières, et les plans de développement communautaire font désormais l’objet d’un suivi plus rigoureux. À la Primature, nous veillons à ce que chaque projet structurant intègre des mesures fortes d’insertion locale, de formation professionnelle et d’accès aux opportunités économiques pour les jeunes et les femmes.
Notre ambition est claire : faire des communautés des actrices à part entière du développement minier.
Des plateformes de projection stratégique pour la Guinée
Guineemining.info : Quel rôle jouent les grandes rencontres internationales dans le renforcement de la stratégie minière et économique guinéenne ?
Mohamed Lamine Sy Savané :
Ces plateformes sont aujourd’hui des espaces essentiels de diplomatie économique. Elles permettent aux États de projeter leur vision stratégique, de valoriser leur attractivité et de nouer des alliances gagnant-gagnant.
Pour la Primature, elles représentent des leviers pour défendre un discours cohérent sur nos réformes, renforcer le dialogue public-privé, et rencontrer des partenaires techniques, financiers et institutionnels.
Nous les utilisons également pour repositionner des projets intégrés majeurs comme Simandou sur l’échiquier international, tout en faisant entendre la voix de la Guinée dans les débats mondiaux sur la gouvernance des ressources naturelles.
Vers une gouvernance africaine des ressources
Guineemining.info : En quoi les discussions autour de la souveraineté minière prennent-elles une dimension panafricaine aujourd’hui ?
Mohamed Lamine Sy Savané :
La souveraineté minière ne peut plus être pensée uniquement à l’échelle nationale. Elle appelle une réponse continentale, structurée et concertée. Les enjeux comme la transition énergétique, les critères ESG, ou la création de chaînes de valeur industrielles africaines exigent une solidarité stratégique entre États.
L’Afrique ne peut plus être réduite à un simple réservoir de matières premières. Elle doit désormais s’affirmer comme un acteur de la recomposition économique mondiale. Cela suppose une gouvernance collective ressources, des mécanismes partagés et des partenariats fondés sur le respect mutuel et la co-construction.
Propos recueillis par I. NDIAYE. www.guineemining.info