Des plantes en bonne santé peuvent contribuer à éliminer la faim, à réduire la pauvreté, à protéger l’environnement et à stimuler le développement économique, a souligné l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à l’occasion de la Journée internationale de la santé des végétaux.
Mais si les végétaux sont source de vie – ils constituent 80% de la nourriture que nous consommons et produisent 98% de l’oxygène que nous respirons -, la hausse des températures, les voyages et les échanges internationaux ont une incidence sur l’introduction et la dissémination des organismes nuisibles aux végétaux, avertit la FAO.
C’est pourquoi, dans un reportage sur l’impact du commerce électronique sur la santé des végétaux, l’agence onusienne invite à « bien réfléchir avant de cliquer ».
Réduire les risques du commerce électronique sur la santé des végétaux
Le commerce électronique s’est développé partout dans le monde en raison de son côté pratique, particulièrement pendant la pandémie de Covid-19. Or, nombre de personnes ignorent que les végétaux et les produits réglementés, comme les produits agricoles, qui sont achetés ou vendus en ligne, peuvent être vecteurs de ravageurs et de maladies susceptibles de nuire à la flore des pays dans lesquels ils sont importés.
En 2021, Emily* a reçu à son domicile, à Christchurch (Nouvelle-Zélande), un colis qu’elle n’attendait pas. Sa fille de 12 ans, qui ne l’avait pas informée, avait acheté en ligne des œufs d’insecte.
« Ma fille a toujours aimé les insectes. Elle est passée par différentes phases où elle s’est prise de passion pour les espèces aquatiques, les fourmis et d’autres insectes », explique-t-elle. « Mais je ne m’attendais pas à recevoir un colis pendant le confinement, alors j’étais inquiète. Ma fille, qui veut devenir entomologiste, m’a expliqué qu’elle avait acheté les œufs d’insecte en ligne et qu’ils provenaient du Portugal. Une fois éclos, elle espérait en faire ses animaux de compagnie ».
Emily et son mari, conscients des risques que pouvait présenter la situation, ont appelé un ami qui leur a conseillé de contacter le ministère des Industries primaires de la Nouvelle-Zélande.
Carolyn Bleach est responsable de l’équipe ministérielle chargée de repérer les incursions et de garantir la biosécurité dans le domaine de la santé des végétaux. Elle indique qu’en cas de signalement d’un problème, son équipe a la responsabilité de contacter en moins de 30 minutes la personne à l’origine du signalement. « Nous nous sommes entretenus avec la mère de l’enfant et nous lui avons indiqué que nous devions détruire ces œufs pour réduire les risques.»
L’équipe ministérielle a indiqué à Emily la procédure qu’elle devait suivre : ouvrir soigneusement le colis, prendre des photos et entreposer le colis dans le congélateur pendant toute la nuit, puis le déposer dans sa boîte aux lettres le lendemain matin. Le ministère des Industries primaires a dépêché un agent chargé du repérage des incursions qui a récupéré le colis au domicile d’Emily en évitant tout contact et a transporté les œufs jusqu’au laboratoire ministériel pour la protection de l’environnement et la santé des végétaux afin de procéder à leur identification et de vérifier s’ils présentaient un risque.
À l’issue de tests diagnostiques, le ministère a identifié 14 spécimens viables d’œufs de phasme. Si certaines espèces sont relativement répandues en Nouvelle-Zélande, le phasme morose (Carausius morosus), qui se trouvait dans le colis d’Emily, n’y est pas établi et son importation y est interdite en raison des dégâts qu’il est susceptible de causer à la biodiversité.
« S’il s’établissait en Nouvelle-Zélande, ce phasme pourrait nuire à la flore locale et modifier les aires de répartition de la faune endémique, mais il pourrait également porter préjudice à nos industries primaires », précise Carolyn Bleach.
D’après la FAO, la Nouvelle-Zélande est l’un des principaux pays producteurs et exportateurs de fruits et de légumes frais, comme les kiwis, les pommes et les avocats. Ses exportations de produits végétaux et animaux ont atteint un volume total de 4,5 milliards d’USD en 2021.
Les ravageurs peuvent être présents non seulement dans les végétaux, mais aussi dans la terre de plantes importées et dans les matériaux d’emballage en bois, les semences ou les produits composés de bois d’œuvre, tels que les articles d’artisanat, le mobilier et les planches.
Les ravageurs et les maladies des végétaux peuvent se propager d’un pays à l’autre par voie postale traditionnelle ou par l’intermédiaire de services de livraison rapide et de fret aérien ou maritime. Si l’article que vous importez n’est pas accompagné d’un certificat phytosanitaire confirmant qu’il est exempt de ravageurs et de maladies, il existe un risque important de voir un organisme nuisible s’introduire et se propager dans de nouvelles zones.
Une fois qu’un organisme nuisible à des végétaux s’est établi dans un nouveau périmètre, son éradication devient très coûteuse et presque impossible. Chaque année, jusqu’à 40% de la production végétale est détruite par des ravageurs, ce qui équivaut à des pertes commerciales pouvant atteindre 220 milliards de dollars.
Protéger les végétaux de la planète
La Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV) a été créée pour prévenir l’introduction et la propagation de ravageurs et de maladies des végétaux. Hébergée à la FAO, la CIPV est le seul organe conventionnel international qui a été créé pour protéger la santé des végétaux. Ratifiée par 184 pays, la Convention contribue à prévenir l’introduction d’organismes nuisibles dans certains territoires, à préserver les végétaux et à promouvoir un commerce sans risque en instaurant des normes internationales et en aidant les pays à les mettre en œuvre.
Les normes internationales empêchent également la dissémination de ravageurs et de maladies d’un pays à l’autre. Les pays peuvent s’appuyer sur les normes internationales pour les mesures phytosanitaires de la CIPV, qui constituent la référence absolue en matière de santé des végétaux, afin de mettre au point leur législation phytosanitaire et leurs exigences à l’importation à l’échelon national.
Les autorités peuvent se servir de ces normes comme repères pour mettre en œuvre leurs programmes et leurs activités phytosanitaires, qui vont de la surveillance des organismes nuisibles à l’analyse des risques phytosanitaires dans une zone délimitée en passant par la détection de ravageurs importants et l’élaboration de programmes d’éradication.
L’adhésion à la CIPV et l’adoption de ses normes contribuent non seulement à simplifier le commerce de produits végétaux en écartant les risques, mais aussi à accroître la productivité des cultures, ce qui, en définitive, est bénéfique pour la sécurité alimentaire mondiale. La protection de la santé végétale est également bénéfique pour l’environnement et la biodiversité.
Sensibiliser la population mondiale à la santé des végétaux
Le ministère des Industries primaires a détruit les œufs de phasme, leur introduction en Nouvelle‑Zélande étant interdite, et a informé Emily que l’espèce qui avait été identifiée était une espèce allochtone. Emily a expliqué à sa fille que la meilleure façon de procéder à l’avenir serait de chercher à comprendre les répercussions que ses actes pourraient avoir à plus grande échelle et de « bien réfléchir avant de cliquer ».
Les actions de sensibilisation aux risques phytosanitaires sont essentielles pour éviter que les organismes nuisibles ne se disséminent d’un pays à l’autre et ne s’établissent dans de nouvelles zones.
En plus d’informer les particuliers de l’importance de la santé des végétaux, la CIPV œuvre également avec des organisations nationales de protection des végétaux pour qu’elles puissent appliquer des normes destinées à assurer la sécurité des importations.
*Le nom de la personne concernée a été modifié pour protéger son identité