Cet article a pour but de faire un point sur la procédure pénale suivie en matière de fraude fiscale. C’est aussi une promesse et une dédicace faites à un de mes chefs. Il est le directeur de la Performance et stratégie de la DGI. Comme je l’expliquait à mes étudiants selon l’art.403 : « l’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ». Cependant, les textes instituant le régime de la T.V.A ont conservé le système du paiement fractionné de la taxe à la production mis en place 1998 et maintenu la notion de crédit d’impôt ainsi que la possibilité d’obtenir le remboursement de ce crédit. Il est rapidement apparu que, dans certains cas, le crédit d’impôt remboursé était fictif parce qu’il ne correspondait pas à des opérations commerciales réelles. Le délit ne tombe alors que sous le coup de l’article 403. Il est coupable du délit de fraude fiscale toute personne qui s’est frauduleusement soustraite ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel de tout impôt, taxe ou redevance : soit qu’elle ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l’impôts ; soit qu’elle ait organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d’autres manœuvres au recouvrement de l’impôt ; soit qu’elle ait sciemment omis de passer ou de faire passer des écritures comptables ou ait passé ou fait passer des écritures comptables inexactes ou fictives ; soit qu’elle ait agi de toute autre manière frauduleuse. Pour que l’infraction soit caractérisée, il est nécessaire que l’auteur ait été animé d’une intention de fraude. La preuve du caractère intentionnel incombe aux parties poursuivantes. Nonobstant les pénalités fiscales et l’intérêt de retard, le délit de fraude fiscale est passible d’une amende d’un milliard (1 000 000 000) de Francs guinéens et d’une peine d’emprisonnement d’un (1) an à trois (3) ans à prononcer par le Tribunal compétent. Les poursuites en vue de l’application des sanctions pénales sont engagées devant le Tribunal compétent sur plainte de l’Administration fiscale. Les poursuites sont portées devant le Tribunal compétent dans le ressort duquel l’infraction a été constatée. Le montant de l’amende est porté à trois milliards (3 000 000 000) de Francs Guinéens et à cinq ans d’emprisonnement lorsque : la fraude a été commise en bande organisée ; la fraude a été réalisée ou facilitée au moyen : de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d’organismes établis à l’étranger ; d’une fausse identité ou de faux documents ; d’achats ou de ventes sans facture ou de factures ne se rapportant pas à des opérations réelles ; d’une domiciliation fiscale fictive à l’étranger ; d’un acte fictif ; de l’interposition d’une entité fictive ; de l’interposition d’une personne physique ou morale à l’étranger. Les complices sont solidairement tenus avec le redevable légal de l’impôt fraudé au paiement des droits et des pénalités y afférentes dès lors qu’ils ont fait l’objet d’une condamnation pénale définitive au vu des dispositions du présent article. Sans préjudice des peines accessoires prononcées par le Tribunal compétent, toute personne condamnée en application des dispositions du présent article, au titre d’auteur principal ou de complice, peut être passible d’une peine d’exclusion des marchés publics pendant une période de cinq (5) ans. La juridiction peut, en outre, ordonner la publication et l’affichage de la décision prononcée.
En conclusion, pour passer du niveau de la fraude fiscale à celui de l’escroquerie, le redevable doit avoir eu recours à des actes extérieurs aux déclarations elles-mêmes et susceptibles de conforter les allégations mensongères figurant dans la déclaration. Parmi ces agissements extérieurs l’administration a relevé principalement : la falsification de factures d’achats réels ; l’établissement de factures d’achats fictifs ; la création de fausses entreprises chargées d’établir des factures de complaisances faisant apparaître la T.V.A et permettant à leurs clients de la récupérer de façon frauduleuse. Après avoir persuadé l’administration de l’existence à son profit d’un crédit de T.V.A imaginaire, l’escroc va pouvoir obtenir la remise des fonds soit par remboursement direct au moyen d’une demande en restitution, soit par imputation sur le montant de la T.V.A due en raison de la réalisation d’affaires imposables.
Dr ALIOU BAH , Inspecteur Principal des Impôts