« L’ordre mondial actuel ne fonctionne pas pour tout le monde », a déclaré vendredi le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, dans un discours lors la 60e édition de la Conférence de Munich sur la sécurité, surnommée le « Davos de la défense ».
« En fait, j’irais plus loin et je dirais que ça ne marche pour personne », a-t-il ajouté.
Le monde est confronté à des défis existentiels, avec une communauté internationale qui se trouve « plus fragmentée et divisée que jamais depuis 75 ans », à la fin de la Seconde guerre mondiale.
« Même la Guerre froide était moins dangereuse », a poursuivi le Secrétaire général des Nations Unies devant un parterre d’une cinquantaine de chefs d’Etat et une centaine de ministres du monde entier. A la menace nucléaire, toujours présente, s’ajoutent en effet la crise climatique et « les risques d’une intelligence artificielle non contrôlée ».
Comme le montre clairement le Rapport de Munich sur la sécurité, publié chaque année avant la conférence, « les gains relatifs issus de la compétition entre les pays ont la priorité sur les gains absolus pour tous grâce à la coopération », a averti M. Guterres.
« Les crises se multiplient, liées à la concurrence et à l’impunité. Un ordre mondial qui profite à tous doit combler ces lacunes et apporter des solutions. Si les pays remplissaient leurs obligations au titre de la Charte des Nations Unies (…), chaque personne sur Terre vivrait en paix et dans la dignité », a-t-il ajouté.
Guerre à Gaza et en Ukraine
Selon le chef de l’ONU, la situation à Gaza constitue un « constat effroyable de l’impasse dans laquelle se trouvent les relations mondiales ».
« Rien ne peut justifier les attaques inadmissibles lancées par le Hamas le 7 octobre contre Israel », a souligné António Guterres devant les chefs d’État et de gouvernement présents à Munich. « Et rien ne peut justifier la punition collective du peuple palestinien dans la réponse militaire israélienne ».
« Une offensive totale contre la ville [de Rafah] serait dévastatrice pour les 1,5 million de civils palestiniens qui sont déjà au bord de la survie », a-t-il averti. « J’ai appelé à plusieurs reprises à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages ainsi qu’à un cessez-le-feu humanitaire. (…) Cela doit être le fondement de mesures concrètes et irréversibles vers une solution à deux États, fondée sur le droit international et les résolutions des Nations Unies ».
Par ailleurs, le chef de l’ONU a estimé que la guerre déclenchée par l’invasion russe de grande ampleur de l’Ukraine il y a deux ans « en violation flagrante de la Charte des Nations Unies » n’a pas sa place dans l’Europe du XXIe siècle. Les souffrances et les pertes en vies humaines ont été épouvantables, tandis que l’impact sur l’économie mondiale a été dévastateur, en particulier pour les pays en développement.
« Nous avons désespérément besoin d’une paix juste et durable pour l’Ukraine, pour la Russie et pour le monde. Une paix conforme à la Charte des Nations Unies et au droit international, qui établit l’obligation de respecter l’intégrité territoriale des États souverains », a-t-il dit.
Le Sommet de l’avenir
Au-delà de la gestion des crises immédiates, comme en Ukraine, au Soudan ou en Libye, António Guterres a estimé qu’il fallait renforcer l’architecture mondiale de paix et de sécurité pour faire face aux menaces et aux défis actuels, tels que la crise climatique, l’intelligence artificielle ou les cyberarmes.
Il a expliqué que le Nouvel Agenda pour la paix, qui sera discuté lors du Sommet de l’avenir en septembre 2024, vise à mettre à jour les systèmes de sécurité collective basés sur un multilatéralisme plus connecté et inclusif pour un monde en transition.
Visite à la Synagogue Ohel Jakob de Munich
Jeudi, un jour avant le début de la Conférence de Munich sur la sécurité, Guterres a visité la Synagogue Ohel Jakob à l’invitation du Congrès juif mondial, en compagnie de Charlotte Knobloch, présidente de la communauté juive de Munich et de Haute-Bavière et ancienne vice-présidente du Congrès juif mondial.
Mme Knobloch et M. Guterres ont parcouru la « Promenade du Souvenir », qui contient les noms de plus de 4.500 Juifs munichois assassinés pendant l’ère nazie.
Lors de la visite à la synagogue, Guterres a déclaré qu’il considérait la lutte contre l’antisémitisme comme une « obligation morale » de tout être humain. « Je peux avoir quelquefois des désaccords avec les politiques et les actions du gouvernement d’Israël, mais cela ne peut jamais être confondu avec une croyance très claire que les droits du peuple israélien à vivre en sécurité sont nécessaires », a-t-il