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Des conteneurs sont chargés sur des navires dans un port de Los Angeles, aux États-Unis.
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Entre une flotte vieillissante, une taille démesurée des bateaux et un retard dans la transition énergétique, un nouveau rapport des Nations Unies s’est inquiété, mardi, de l’impact du marché du transport maritime sur le réchauffement de la planète.
L’étude de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) démontre qu’entre 2020 et 2021, les émissions de gaz à effet de serre du commerce maritime ont augmenté de 4,7%, en raison des porte-conteneurs, des vraquiers secs et des navires de marchandises.
Les émissions totales de carbone de la flotte maritime mondiale ont augmenté de 4,7%. La plupart des augmentations proviennent des porte-conteneurs, des vraquiers secs et des navires de marchandises diverses. « Nous ne devons pas retarder la décarbonation du transport maritime », a d’ailleurs alerté la Secrétaire générale de la CNUCED, Rebeca Grynspan, appelant à des navires plus « verts pour réduire l’empreinte carbone du transport maritime ».
En 2021, le commerce maritime mondial a progressé de plus de 3%, selon les estimations, une augmentation de sept points par rapport à la diminution de près de 4% enregistrée en 2020 en raison de la pandémie. Les chargements ont atteint environ 11 milliards de tonnes.
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Un porte-conteneurs en mer.
Un vieillissement des navires
Mais cette hausse ne s’accompagne pas d’une remise à niveau de la flotte. La CNUCED s’inquiète ainsi de l’augmentation de l’âge moyen des navires.
En nombre de navires, l’âge moyen actuel est de 21,9 ans, et en capacité de transport de 11,5 ans. Selon la CNUCED, le vieillissement des navires s’explique en partie par l’incertitude quant aux développements technologiques futurs et aux carburants les plus rentables, ainsi que par l’évolution des réglementations et du prix du carbone.
Les investissements dans des navires neufs qui permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre seront entravés par l’envolée des taux d’intérêts, l’assombrissement des perspectives économiques et les incertitudes réglementaires, regrette l’agence onusienne.
La CNUCED appelle donc à investir dans la filière, des ports aux navires en passant par des améliorations techniques et opérationnelles afin de réduire l’empreinte carbone du transport maritime. Il s’agit notamment de passer à des carburants alternatifs, à faible teneur en carbone ou sans carbone, d’optimiser les opérations, d’utiliser les sources.
Une taille « démesurée » des bateaux
Sur un autre plan, l’agence onusienne pointe du doigt le surdimensionnement des navires, qui rend difficile l’adaptation des ports des petits pays. En une quinzaine d’années, leur taille a plus que doublé, fait remarquer l’agence onusienne. Plus de la moitié de la capacité mondiale est contrôlée par les quatre principaux groupes.
Entre 2006 et 2022, la taille des plus grands porte-conteneurs du monde a plus que doublé, passant de 9.380 équivalents vingt pieds (EVP) à 23.992 EVP. La taille du plus grand navire de chaque pays a presque triplé, les navires ont donc augmenté plus vite que les volumes de marchandises requises pour les remplir.
La taille démesurée des bateaux et le manque de concurrence du marché doivent inciter les autorités de concurrence à réagir, préviennent mardi les Nations Unies. D’autant qu’entre 1996 et 2022, les 20 premiers transporteurs ont augmenté leur part dans la capacité de transport de conteneurs de 48 % à 91 %.
Prévision à la baisse pour le commerce maritime mondial
Et au cours des cinq dernières années, les quatre plus grands transporteurs ont augmenté leurs parts de marché pour contrôler plus de la moitié de la capacité mondiale. Le nombre de sociétés qui fournissent des services aux importateurs et aux exportateurs a diminué dans 110 pays, notamment dans les petits États insulaires en développement, où parfois un duopole de transporteurs s’est transformé en monopole.
Plus globalement, le commerce maritime est affecté par la guerre en Ukraine et la décélération de l’économie chinoise. Après une relance à plus de 3% l’année dernière, il ne devrait progresser que de moins de 1,5% cette année.
L’Asie est restée le premier centre mondial de traitement des cargaisons maritimes en 2021, représentant 42 % des exportations et 64% des importations. En Afrique, le commerce maritime a augmenté de 5,6% en 2021 par rapport à 2020.
Pour 2022, la CNUCED prévoit que la croissance du commerce maritime mondial restera modérée à 1,4%. Et pour la période 2023-2027, il devrait se développer à un taux annuel de de 2,1%, soit un rythme plus lent que la moyenne sur les trois décennies précédentes (3,3%).
Pour une hausse des investissements dans les chaînes logistiques maritimes
De 2023 à 2027, la croissance devrait certes augmenter, de 2,1% en moyenne. Mais cette progression sera inférieure à celle de plus de 3% observée ces dernières décennies.
Pendant longtemps, l’activité était portée par le commerce de conteneurs. Celle-ci ne devrait progresser que de 1,2% cette année, avant d’approcher les 2% l’année prochaine, selon la CNUCED.
Face à ces prévisions, la CNUCED appelle à une augmentation des investissements dans les chaînes logistiques maritimes. Les navires transportent plus de 80% des marchandises échangées globalement, pourcentage supérieur pour la plupart des pays en développement, d’où l’urgence de renforcer la résilience aux chocs qui perturbent les chaînes d’approvisionnement, alimentent l’inflation et affectent durement les personnes les plus démunies.
Les ports, la flotte des navires marchands et les liaisons avec l’arrière-pays doivent être mieux préparés aux futures crises, au changement climatique et à la transition vers une énergie à faible teneur en carbone. Il s’agit de renforcer des infrastructures intermodales, de renouveler la flotte des navires et d’améliorer les performances portuaires pour faciliter les échanges commerciaux.