La commémoration dans la salle de l’Assemblée générale a eu lieu pour rendre hommage aux victimes et honorer les survivants et ceux qui ont tenté de mettre fin au génocide.
L’accent a également été mis sur les jeunes qui ont grandi dans son ombre et sur la lutte contre les discours de haine qui ont alimenté les meurtres et sont devenus aujourd’hui une préoccupation mondiale croissante.
100 jours de terreur
« Le génocide contre les Tutsis au Rwanda il y a 30 ans est une tache sur notre conscience collective et un rappel brutal de l’héritage du colonialisme et des conséquences du discours de haine », a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, dans son discours d’ouverture.
Plus d’un million de personnes – en grande majorité des Tutsis, mais aussi des Hutus et d’autres opposants au génocide – ont été massacrées en 100 jours, à partir du 7 avril 1994. Beaucoup ont été tuées à coups de machette.
C’était une époque où « les voisins se retournaient contre les voisins, les amis devenaient des ennemis meurtriers et des familles entières étaient anéanties », a rappelé M. Guterres. « Le carnage était motivé par l’intention explicite de détruire les membres d’un groupe simplement en raison de leur identité ethnique ».
Plus jamais
Le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Dennis Francis, a souligné que « l’horreur née d’un niveau de haine virulent et insensé » qui a englouti le Rwanda il y a trente ans « ne devrait plus jamais pouvoir dresser sa tête venimeuse dans la conscience et le cœur humains ».
Il a exhorté les gens du monde entier à prendre conscience des conséquences dangereuses des discours de haine, en particulier à l’ère des médias sociaux « où les mots que nous prononçons sans précaution peuvent se propager comme une traînée de poudre », ainsi que des conséquences de l’inaction internationale face aux conflits.
« Le génocide contre les Tutsis présentait des signes avant-coureurs qui n’ont pas été pleinement pris en compte et il s’est déroulé au vu et au su de la communauté mondiale – qui a lamentablement échoué au Rwanda en ne prenant pas de mesures rapides pour le prévenir ou l’arrêter », a-t-il déclaré. « N’oublions jamais que la paix nécessite un effort actif – et surtout de la prévention ».
Se souvenir
L’auteur-compositeur et auteur rwandais Claver Irakoze n’avait que 11 ans lorsque les violences indescriptibles ont commencé. Son père enseignait dans une école secondaire à Kapagyi, située à environ 40 kilomètres au sud-ouest de la capitale, Kigali, et la famille y a trouvé refuge.
Tôt le matin du 28 avril, des soldats sont venus et ont emmené 61 hommes, dont son père, et les ont chargés « comme une cargaison » dans un camion.
« C’était la dernière fois que je voyais mon père », a-t-il déclaré. « Je me souviens qu’il m’a vaguement fait un signe au revoir, si impuissant. C’est une image qui me vient encore à l’esprit chaque fois que je pense à lui ».
M. Irakoze a depuis écrit deux livres pour enfants pour enseigner des leçons d’espoir et de guérison. Il est également mari et père de deux jeunes enfants.
« Nos tueurs voulaient nous éliminer, mais nous sommes là. Et à travers nous et nos enfants, nous portons le souvenir de ceux que nous avons perdus ».
Éclairer la voie à suivre
Le Rwanda est ressuscité de ses cendres « et est devenu un exemple exceptionnel de ce qui est possible lorsqu’une nation choisit la voie de la réconciliation et du renouveau », a affirmé Ernest Rwamucyo, l’Ambassadeur du pays auprès de l’ONU.
Il a rendu hommage à M. Irakoze et aux autres survivants qui ont éclairé le chemin de la guérison et de la réconciliation.
« En reconnaissant les sacrifices consentis par les survivants, nous réaffirmons notre détermination collective à ce que les leçons de l’histoire ne soient jamais oubliées. Leurs récits nous obligent à redoubler d’efforts en faveur de la justice, de la responsabilité et de la paix ».
Se souvenir, s’unir, se renouveler
Dans le cadre des événements commémoratifs, le Département de la communication globale des Nations Unies a monté une exposition dans le hall du Secrétariat, intitulée « Se souvenir, s’unir, se renouveler », qui met en évidence le pouvoir de la réconciliation post-génocide, l’impact potentiellement mortel des discours de haine et ce que les visiteurs peuvent faire pour dire #NoToHate.
Au cœur de l’exposition se trouve l’histoire de Laurence Niyonangira, qui a fui les tueries dans sa communauté, menées par d’anciens voisins suite à des discours de haine ciblés. Elle a perdu 37 membres de sa famille dans le génocide.
« En tant que survivants, nous ne pouvons panser nos blessures qu’avec les personnes qui les ont créées », a-t-elle raconté à propos du processus de réconciliation avec Xavier Nemeye, l’un des hommes qui ont tué sa mère et sa sœur.
L’exposition comprend un panneau interactif où les visiteurs peuvent exprimer leur soutien à la tolérance et s’engager à dénoncer les discours de haine.