La fraude fiscale en Guinée en matière d’impositions directes sur le revenu (IS, RTS, VF, RSRNS, etc.) tout comme en impôts indirects d’Etat (TVA, TAF, TCA, etc.) peut se manifester de diverses manières : tantôt le contribuable pour éluder l’impôt n’hésite pas à contrevenir formellement à la loi fiscale : c’est le procédé de la fraude proprement dite. Parfois, au contraire, sans recourir à une violation de la loi, le contribuable réussit à éluder l’impôt ; c’est le procédé de l’évasion fiscale, susceptible de revêtir elle-même diverses formes.
Qu’est-ce que c’est la fraude fiscale ?
« La fraude fiscale est une violation directe et volontaire de la loi fiscale. Selon le Lexique des Termes Juridiques, la fraude fiscale est la soustraction illégale à la loi fiscale de tout ou partie de la matière imposable qu’elle devrait frapper ». Le délit de fraude fiscale consiste à « se soustraire frauduleusement ou à tenter de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel de l’impôt ». Elle suppose ainsi des faits matériels tendant à éluder l’impôt et une intention délibérée de fraude. Elle peut prendre des formes variées : omission volontaire de déclaration, dissimulation volontaire de la matière imposable, organisation d’insolvabilité, autres manœuvres etc. En Guinée, on peut donc distinguer divers types de fraudes fiscales :
–La Dissimulation matérielle : La dissimulation matérielle de l’objet imposable est la forme la plus grossière de la fraude. On peut citer à titre d’exemple la dissimulation d’une partie du patrimoine du défunt pour échapper aux droits de succession, ou bien, encore la dissimilation de marchandises importées pour échapper aux droits de douane.
–Dissimulation comptable :
Une deuxième forme de fraude plus élaborée est celle qui résulte de la dissimulation comptable. Pour les impôts établis sur déclaration, la comptabilité sert fréquemment de base aux vérifications du fisc. La fraude comptable apparaît en effet comme un procédé classique de fraude fiscale. Sans doute, l’administration se méfie des fraudes comptables et elle n’ignore pas que certaines entreprises pratiquent un triple bilan : un bilan fiscal qui est présenté au fisc pour l’établissement des impositions, un deuxième à l’intention de sa banque pour l’obtention des crédits et un bilan commercial retraçant la réalité de leurs opérations. La dissimulation comptable permet aussi d’éluder les taxes sur le chiffre d’affaires. Deux méthodes sont surtout pratiquées. La « vente sans facture » est la technique la plus ancienne. Elle permet de ne pas faire entrer certaines affaires en comptabilité et de diminuer d’autant le chiffre d’affaires imposable. La « facture sans vente » est un procédé plus élaboré engendré par le mécanisme de la taxe sur la valeur ajoutée, il permet d’obtenir des déductions de taxes pour des opérations fictives pour lesquelles le redevable s’est procuré de fausses factures. Ce procédé a donné naissance à toute une industrie de fournisseurs de fausses factures permettant des déductions de taxes ; ils sont appelés dans le jargon des fraudeurs : les factures « taxis ».
3)- La dissimulation juridique : cette troisième forme de fraude consiste à maquiller une situation de fait derrière une situation juridique apparente moins imposée : ainsi on maquillera une participation aux bénéfices sous forme de salaires ; ou bien encore on fera passer une vente pour une donation dont le prix ne sera jamais payé.
– Présomption de fraude : Il existe enfin des cas où la fraude est présumée avoir été commise, dès lors que certains éléments se trouvent réunis, à charge pour le contribuable d’apporter la preuve contraire. Ainsi, il existe certaines présomptions légales de fraude : par exemple, sont présumées introduites en fraude sur le territoire national des marchandises trouvées dans une certaine zone frontière à l’intérieur de ce que l’administration des douanes appelle le « périmètre » lorsque le détenteur de ces objets ne peut pas prouver qu’il a acquitté les droits de douane sur eux. De même, en France par exemple, il existe une présomption de transfert indirect de bénéfices lorsque des avantages particuliers – par voie de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente, ou par tout autre moyen – sont consentis par une entreprise française à une entreprise étrangère.
En conclusion, la fraude et l’évasion fiscale cause de l’incivisme fiscal en Guinée comme on l’a déjà noté plus haut a des conséquences regrettables tant pour le rendement de l’impôt que pour la justice fiscale et pour l’économie où elle amène des distorsions.
Dr BAH ALIOU, Inspecteur Principal des Impôts