Un projet de loi relatif aux communications électroniques inquiète la corporation depuis son adoption en commission le 14 mars. Le texte prévoit notamment la pénalisation de la divulgation des messages électroniques, qui pourrait être utilisée abusivement contre les journalistes. Reporters sans frontières (RSF) demande l’abandon de cet article 214, ou tout au moins une exemption pour les journalistes, afin de garantir leurs conditions d’exercice.
Ce ne sont que deux lignes dans un document de 82 pages qui ont créé de nombreux remous. L’alinéa 3 de l’article 214 du projet de loi relatif aux communications électroniques – adopté par les députés ivoiriens en commission le 14 mars – a provoqué l’ire des journalistes, notamment les spécialistes de l’investigation.
L’alinéa en question dispose que “quiconque intercepte, divulgue, publie ou utilise le contenu des messages ou révèle leur existence” encourt une peine de 5 ans d’emprisonnement et de 10 millions de Francs CFA (environ 15 245 euros). Deux députés, dont le député indépendant et fondateur du journal d’investigation L’Eléphant déchaîné, Tiémoko Assalé, ont proposé sans succès des amendements pour protéger les journalistes. Le projet de loi doit désormais être soumis à l’Assemblée nationale en séance plénière le 18 avril.
Dans un communiqué diffusé le 15 mars, l’Organisation nationale des journalistes d’investigation de Côte d’Ivoire (ONJI-CI) a pointé une disposition qui risque de dissuader “les journalistes de poursuivre certaines enquêtes”. Le président de l’ONJI-CI, Seriba Koné, plaide pour son retrait : “Si une exception est incluse, elle restera soumise à l’interprétation des magistrats”, justifie-t-il.
“L’adoption du projet de loi de la matière constituerait un signal inquiétant pour les journalistes en Côte d’Ivoire. L’alinéa 3 de l’article 214 ouvre la porte à des abus de pouvoir et pourrait contribuer à l’implantation d’un climat d’autocensure pour les journalistes ivoiriens. RSF demande le retrait de cet alinéa, ou, à minima, une clause d’exception concernant les informations d’utilité publique.”
Sadibou Marong
Directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF