« Ces engins de mort n’ont pas leur place sur notre planète », a déclaré António Guterres, fustigeant les armes nucléaires comme une double folie.
Selon lui, ces armes capables d’anéantir des populations, des communautés et des villes entières en une seule frappe, de déclencher une catastrophe humanitaire qui ne connaitrait pas de frontières, sont loin d’apporter une véritable sécurité et stabilité.
« Elles constituent un danger imminent et font peser une menace constante sur notre existence », a-t-il ajouté.
Ces engins de mort n’ont pas leur place sur notre planète
Autre aberration : malgré les risques énormes et existentiels que ces armes font courir à l’humanité, nous ne sommes pas plus près de les voir disparaître qu’il y a dix ans.
« À vrai dire, nous allons dans la direction complètement opposée », a-t-il déploré. « Jamais, depuis les pires heures de la Guerre froide, le spectre des armes nucléaires n’a jeté une telle ombre ».
Menaces et rodomontades nucléaires
Le Secrétaire général a constaté que les rodomontades nucléaires atteignent leur paroxysme. Il a évoqué les menaces d’emploi de ces armes et sa crainte d’une nouvelle course aux armements, « alors que parallèlement, on voit s’éroder les normes qui, laborieusement, avaient été élaborées au fil des décennies pour prohiber l’emploi, la dissémination et la mise à l’essai de ces armes ».
Evoquant ce qu’ont vécu dans leur chair les hibakusha, ces courageux survivants d’Hiroshima et de Nagasaki, António Guterres a noté que près de 80 années après les horribles frappes atomiques de 1945, « les États dotés d’armes nucléaires continuent de jouer avec le feu, de se soustraire aux mesures de désarmement et de croire que, d’une manière ou d’une autre, la chance les servira toujours ».
Compter sur la chance n’est pas une stratégie
« Toutefois, la chance n’est pas une stratégie. Ils doivent cesser de jouer avec l’avenir de l’humanité », a-t-il rappelé, exhortant les Etats dotés d’armes nucléaires à respecter leurs obligations en matière de désarmement, et tant que ces armes n’auront pas été éliminées, « à s’engager à ne jamais les utiliser, quelles que soient les circonstances, tout en faisant preuve d’une plus grande transparence sur toutes les questions concernant ces armes ».
António Guterres s’est particulièrement adressé aux Etats-Unis et à la Russie pour leur demander de s’engager de nouveau dans une démarche visant à limiter les armes nucléaires, à laquelle les autres Etats dotés de ces armes pourront se joindre en temps voulu ».
« Le désarmement et la non-prolifération sont les deux faces d’une même médaille », a déclaré le Secrétaire général. « Tout progrès d’un côté entraîne des progrès de l’autre ».
Il a noté que quelques jours plus tôt, en adoptant le Pacte pour l’avenir, la communauté internationale a pris le nouvel engagement de revitaliser le régime mondial de désarmement et d’avancer vers la réalisation de l’objectif commun d’élimination totale des armes nucléaires.
Un objectif, rappelle-t-il, qu’avaient annoncé les Etats membres dans la première résolution appelant au désarmement nucléaire, adopté en…1946 par l’Assemblée générale.
« Les dirigeants ne peuvent pas échapper à leur responsabilité primordiale de prendre des mesures concrètes pour réduire la menace nucléaire – et y mettre fin, une fois pour toutes », a conclu le Secrétaire général.
Des instances de récriminations plus que de consensus
Partageant ce constat alarmant, Philemon Yang, Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, a déploré l’émergence du chantage nucléaire, « les menaces imprudentes proférées par certains de recourir à ces armes ».
Il s’est en outre inquiété du « lien croissant entre les armes nucléaires et des domaines tels que l’espace extra-atmosphérique et cyberspatial, ou l’intelligence artificielle, qui multiplient le danger d’une catastrophe nucléaire ». Mais il a aussi mis en garde contre l’érosion du régime même conçu pour empêcher l’emploi, les essais et la prolifération de ces armes.
Philémon Yang a ainsi rappelé l’échec, en 2022, d’un consensus lors de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération, puis, un an plus tard, celui de l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, à la suite du retrait de la ratification du Traité par un Etat.
L’année 2023, a-t-il regretté, a également été marquée par la suspension de la mise en œuvre du nouveau traité de réduction des armes stratégiques (New START), un accord crucial pour promouvoir la stabilité stratégique et réduire le risque nucléaire entre les États-Unis et la Fédération de Russie.
« Non seulement le régime de désarmement et de non-prolifération est érodé, mais les instances de désarmement, qui devraient être le lieu où les États se réunissent et élaborent des solutions, deviennent de plus en plus des lieux de récriminations et de ruptures de consensus », a constaté Philémon Yang. « Cela ne peut tout simplement pas continuer ».