Alors que le procès du journaliste Pape Malick Thiam de la chaîne de télévision 7TV s’ouvre demain au Sénégal, RSF demande l’abandon de toutes les charges retenues contre lui et appelle les responsables des forces de sécurité à privilégier le dialogue avec les journalistes, dans un contexte de forte recrudescence des attaques à leur encontre. Pape Malick Thiam comparaîtra libre, mercredi 20 avril, devant un tribunal des flagrants délits à Dakar, la capitale sénégalaise. Le 14 avril, le journaliste de la chaîne de télévision privée 7TV, qui était parti couvrir une confrontation de témoins dans une affaire présumée de viol entre une jeune masseuse et un opposant politique, a été arrêté au tribunal de Dakar suite à une altercation avec un gendarme. Accusé du délit « d’outrage à agent », il est resté en garde à vue 24h avant d’être remis en liberté provisoire. Maimouna Ndour Faye, la directrice de 7TV a déclaré aux médias que son confrère avait été battu et maltraité pendant sa garde à vue par des membres de la gendarmerie qui l’avaient arrêté, précisant qu’il avait perdu ses lunettes dans la foulée. Joint par RSF, son avocat a déclaré que son client lui a confié avoir signé le procès-verbal sous le coup de la pression et « sans même le lire ». En février 2021, la presse avait révélé une plainte déposée contre l’opposant Ousmane Sonko pour le viol présumé d’une employée d’un salon de massage. Cette plainte avait déclenché d’importants troubles sociopolitiques au Sénégal et donné lieu à une vague d’attaques contre plusieurs médias. “Aussi sensible soit-elle, cette affaire ne peut plus être le prétexte aux pires attaques contre les médias et journalistes enregistrées ces dernières années au Sénégal, déclare Sadibou Marong, directeur du bureau de RSF pour l’Afrique de l’Ouest. Si le Sénégal veut continuer à jouir d’une presse libre et indépendante dont les acteurs ne craignent ni pour leur intégrité physique ni pour leur liberté, il est primordial de privilégier le dialogue. Il est par ailleurs essentiel que les auteurs d’actes répréhensibles contre les journalistes soient sanctionnés, sans quoi ces agissements risquent de se multiplier.” Depuis ces événements de février 2021, RSF déplore une forme de libération de la violence contre les journalistes. Le 15 avril 2022, Ousmane Kane, journaliste pour la RTS (Radio-Télévision Sénégalaise) à Louga, au nord du pays, a été agressé par des membres du personnel d’un hôpital de la ville, alors qu’il était en reportage après la mort par défaut de soins d’une jeune femme enceinte de 9 mois, ce qui a provoqué une grande émotion dans le pays. Ousmane Kane a déclaré à RSF qu’il avait été insulté et violenté par le personnel dans l’enceinte même de l’hôpital où il allait interviewer un accompagnant. Il a ajouté que ses deux téléphones et ses lunettes avaient été cassés et son matériel de travail confisqué. En soutien à Kane, le collectif des journalistes de Louga a déposé une plainte au commissariat central de Louga contre les agresseurs. Début mars, le journaliste Pape Ndiaye du groupe de presse Walf Fadjri avait quant à lui été victime d’injures et de menaces. Il avait reçu une vingtaine de messages vocaux et d’appels dont certains émis depuis l’étranger à la suite d’une émission sur laquelle il s’était prononcé sur le cas de cette jeune masseuse. RSF a pu voir la liste des appels avec des numéros de téléphone bien identifiés et une succession de messages vocaux insultant et menaçant le journaliste. RSF appelle les autorités sénégalaises à tout mettre en œuvre pour que les nombreuses menaces de violence et les attaques dont les journalistes sont victimes ces derniers mois fassent l’objet d’enquêtes appropriées afin d’éviter une escalade vers des agressions plus graves. Le Sénégal occupe la 47e place au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF |