La communauté internationale doit renforcer la préparation et la riposte de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) aux urgences sanitaires et conclure un traité sur les pandémies, ont indiqué lundi les anciennes coprésidentes du Groupe indépendant d’experts sur la préparation et la réponse aux pandémies.
Selon l’ancienne Présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, et l’ancienne Première ministre néo-zélandaise, Helen Clark, le programme de réforme de la lutte contre la pandémie de Covid-19 progresse, mais pas assez rapidement ni de manière assez cohérente.
Dans son rapport semestriel, les expertes du Groupe évaluent les domaines liés au leadership et à la gouvernance, au financement, mais aussi à un nouvel instrument juridique et à une OMS plus forte.
Les coprésidentes du panel ont réitéré leur appel à des réformes urgentes qui doivent inclure un nouveau financement d’au moins 10 milliards de dollars par an pour la préparation à la pandémie, ainsi que des négociations sur un traité mondial sur la pandémie.
Renforcer l’autorité et l’indépendance de l’OMS est essentiel
Pour le Groupe, l’Agence sanitaire mondiale de l’ONU doit être renforcée par une plus grande capacité d’enquête sur les pandémies grâce à un nouveau traité.
« Le renforcement de l’autorité et de l’indépendance de l’OMS et l’élaboration de nouveaux instruments juridiques sont essentiels à l’ensemble des réformes requises », a fait valoir le panel.
Ce traité devrait viser à renforcer la préparation, l’obligation pour les pays d’alerter l’OMS en cas d’épidémie et de permettre des enquêtes rapides, ainsi qu’un accès équitable aux vaccins et aux médicaments.
« Pour que l’OMS puisse répondre à tout son potentiel face aux menaces de pandémie, les contraintes qui pèsent sur elle doivent être levées, notamment par un financement adéquat et flexible », ajoute le rapport, insistant sur « le besoin d’un financement plus important et d’une plus grande capacité à enquêter sur les pandémies potentielles et à les signaler plus rapidement et de manière indépendante ».
Travailler avec détermination pour un nouveau Conseil des menaces sanitaires mondiales
« Nous sommes encouragés par le fait qu’il y a un certain mouvement pour combler les lacunes majeures exposées dans la préparation et la réponse à une pandémie mondiale. Des conversations ont lieu dans de nombreux endroits appropriés », a déclaré dans un communiqué Helen Clark.
« Le monde a maintenant besoin que ces discussions se rejoignent – en particulier à l’Assemblée générale des Nations Unies, où les chefs d’État et de gouvernement peuvent déclarer leurs engagements et une voie vers un monde plus sûr, y compris vers un nouveau Conseil des menaces sanitaires mondiales pour fournir un leadership et une responsabilité bien nécessaires ».
Le Panel met toutefois en garde contre le risque de discussions prolongées à l’Assemblée mondiale de la santé et aux Nations Unies alors que le besoin de réformes est urgent.
Le Groupe demande donc aux États membres de travailler avec détermination pour obtenir des résultats concrets qui protégeront les populations.
Une assemblée extraordinaire le 29 novembre pour négocier un traité
Alors que la pandémie continue de provoquer des maladies, des décès et des pertes économiques, elles estiment que les chefs d’État et de gouvernement doivent s’unir pour progresser plus rapidement pour bien mener la réforme de la préparation et de la réponse aux pandémies.
« Nous demandons instamment aux États membres de passer moins de temps à débattre des virgules dans les comités », a dit Mme Clark.
A noter que les ministres de la Santé des 194 États membres de l’OMS ouvrent le 29 novembre prochain une assemblée extraordinaire de trois jours pour se pencher sur la négociation de nouveaux instruments juridiques visant à prévenir de futures pandémies.
Selon les médias, il s’agirait seulement du deuxième traité mondial sur la santé publique, après l’accord de 2003 sur la lutte contre le tabagisme.
En mai dernier, le groupe d’experts a évalué la manière dont l’OMS et les pays membres ont géré la pandémie et a déclaré qu’un nouveau système de réponse mondial devrait être mis en place pour garantir qu’aucun virus futur ne puisse provoquer une pandémie aussi dévastatrice que la Covid-19.
« Des progrès ont été réalisés, mais ils ne sont pas assez rapides ni assez cohérents pour mettre fin à cette pandémie dans le monde entier à court terme, ou pour en prévenir une autre », a estimé le Groupe dans son dernier rapport.
Les doses de rappel dans les pays riches provoquent un profond questionnement « moral »
Selon le Groupe, l’inégalité vaccinale, qui n’a guère changé depuis mai 2021, reste une préoccupation urgente.
Les efforts déployés pour mettre fin à la pandémie de Covid-19 ont été inégaux et fragmentés, marqués par un accès limité aux vaccins dans les pays en développement, tandis que dans les pays riches, c’est la campagne des doses de rappel.
Plus de 7,3 milliards de doses de vaccin ont été administrées dans le monde dont la majorité dans les pays riches, selon le décompte de l’OMS établi au 18 novembre 2021.
« Notre groupe a calculé qu’il y avait au moins un milliard de doses disponibles à redistribuer aux pays à faible revenu au 1er septembre de cette année », a déclaré Ellen Johnson Sirleaf.
« Pourtant, alors que les pays riches ont fait des promesses publiques, seule une fraction des doses redistribuées a été effectivement livrée. L’idée qu’un agent de santé pauvre ne soit pas protégé alors que les personnes riches et en bonne santé reçoivent des doses de rappel devrait susciter un profond questionnement moral. Il n’y a qu’une seule solution : l’équité vaccinale », a-t-elle ajouté.
Plus de 256 millions de cas dont plus de 5 millions de morts
Selon le Panel, la santé mondiale ne peut être laissée en otage à une industrie pharmaceutique qui achète des brevets et les développe dans le but de faire des profits.
Le rapport prévient également que les promesses de vaccins peuvent être compromises par une livraison incohérente et le rejet de vaccins presque périmés, ce qui crée « une occasion perdue de protéger les gens ».
S’agissant du financement, le rapport note une convergence croissante sur la nécessité de trouver de nouveaux financements pour la préparation aux pandémies d’au moins 10 milliards de dollars par an.
Cependant, souligne le Groupe, « une gouvernance sans financement n’a pas de mordant et le financement sans gouvernance n’a pas de responsabilité ».
Plus de 256,6 millions de personnes ont été infectées par le coronavirus SRAS-CoV2 dont 5.148.221 décès, selon un décompte établi lundi par l’OMS.